Voici les différentes newsletter de l'année 2018:
Janvier, février et mars 2018:
Avant tout, nous voulions vous montrer ces chiffres, il s’agit du nombre de patients pris en charge en 2017, au total 8627 !!!
•Moins de 5 ans : 3998
•Plus de 5 ans : 3651
•Suivi grossesse : 348
•Urgences : 630
Janvier :
Je me présente, je suis Elvirah Rispah, infirmière à la mission de lobur. Le mois de janvier a été intense, nous avons donné le meilleur de nous-mêmes pour pouvoir gérer tous les cas auxquels nous avons été confrontés.
J'ai commencé à travailler pour la clinique mobile au mois de juin 2017 et j'apprécie sincèrement le travail que j’effectue ici.
Au mois de janvier, nous avons effectué 17 tournées avec la clinique mobile et nous avons constaté une baisse du nombre de cas de paludisme. C’est une conséquence de l’arrivée de l’été, et de la raréfaction des pluies.
Ce mois-ci, nous avons muté plusieurs patients à Lodwar : une menace d'avortement, un cas psychiatrique très compliqué et un cas de paludisme sévère.
En ce moment, nous assistons à une augmentation des cas de diarrhées, d'otites moyennes et d'infections des voies aériennes supérieures. Cela montre clairement qu'il faut renforcer les mesures préventives, y compris les cours sur l’hygiène. Nous nous efforçons de faire passer ces messages tous les jours pendant les tournées.
Nous nous occupons d’une petite fille de 6 ans, que nous avons trouvée avant noël dans un état terrible. Il s'est avéré qu’elle était porteuse du VIH (avec plusieurs infections opportunistes). Nous avons débuté un traitement et elle vit actuellement avec Joséphine (notre assistante en santé). Avec ses bons soins, une bonne alimentation et un environnement sûr, son état s’améliore rapidement. Les infections ont pratiquement disparu, elle prend du poids et reprend goût à la vie.
Merci à tous ceux qui soutiennent ce projet, nous voyons dan les sourires des gens que nous soignons un remerciement quotidien pour tous ces soutiens.
Février :
Pendant qu’en europe vous aviez la pluie et la neige, ici nous avons eu très chaud. Et février a été un mois difficile pour notre équipe.
Nous avons eu beaucoup d’urgences. Un de nos infirmiers a été absent pendant 10 jours. Pendant ces 10 jours, une de nos infirmières a eu une appendicite, une autre a eu une crise de paludisme suivie d’une pyélonéphrite, enfin un de nos traducteurs a contracté la thyphoïde. Tout cela est arrivé en plein pendant la campagne « chirurgie au turkana ».
Les chirurgiens de cette campagne sont arrivés en février. Nous avions sélectionné des patients qui nécessitaient d’être opérés. Nous avons envoyé 2 voitures pleines à Lodwar. Nos cas les plus marquants ont été un homme blessé par balle à la mâchoire, une femme avec un prolapsus utérin, et plusieurs enfants avec des hernies. Ils ont tous été opérés et ont pu rentrer chez eux. La logistique sur place et pour les transferts a été couteuse, mais ça en valait la peine.
Nous avons aussi eu des bonnes nouvelles : deux bébés sont nés ce mois-ci à la mission. Ils sont tous les deux en bonne santé et leurs mères aussi. Les tournées de la clinique mobile se sont poursuivies. Les discussions sur l’hygiène ont été consacré à l’enseignement de la gestion des plaies et autres lésions cutanées, à savoir comment les gérer, et reconnaître les signes nécessitant la prise en charge par un professionnel.
En dehors des urgences à gérer au sein de notre équipe, nous avons eu plusieurs infections néonatales à gérer, et une urgence en lien avec des violences domestiques.
Par ailleurs une salle d’urgence est en cours de construction. Il reste beaucoup de travail mais cela avance.
Comme toujours, nous vous remercions pour votre collaboratio, merci, merci et merci. Sans vous, ce ne serait pas possible.
Mars :
Les patients continuent d’affluer sous notre arbre lors des tournées de la clinique mobile. Cet arbre qui nous préserve du soleil dans les matins chauds. Lentement arrivent d’abord les enfants, puis les femmes, qui s’assoient en cercle de plus en plus fermé autour de nous, en attendant patiemment leur tour, pour que nous traitions leurs différents maux. D’abord, comme un rituel de la clinique mobile, nous attirons l’attention de toute l’assemblée, ce qui n’est pas toujours facile. Ensuite nous passons un temps à expliquer les principales règles d’hygiène et de prévention pour lutter contre les principaux fléaux sanitaires de la région. Ce mois-ci, nous avons fait un point sur les urgences, comment les reconnaître, quels sont les premiers gestes à effectuer et où se rendre le cas échéant.
Après la discussion et les questions, nous poursuivons en prenant les cas les uns après les autres : enfants, femmes enceintes, et autres adultes. Après cela, nous rangeons tout notre matériel (médicaments, cahiers, matériel médical…), et nous rentrons à la mission pour déjeuner, et se reposer.
En changeant quotidiennement de lieu, nous apportons des soins aux populations les plus reculées de la région. Ce mois-ci nous avons fait des tournées dans l’ensemble des 15 villages de notre secteur.
Nous sommes heureux d’accueillir Mimi, qui revient pour quelques mois pour nous aider avec la clinique mobile.
Nous avons continué à nous occuper d’Atao, la petite fille porteuse du VIH qui vit chez notre traductrice Joséphine car sa mère l’a abandonné dans le village. Sa santé s’améliore tous les jours et on la voit de plus en plus heureuse.
Les situations d’urgence n’ont pas manqué, souvent la nuit ou à l’aube. Nous avons eu le cas d’une vieille dame qui, au milieu de la nuit, avait été écrasée par 2 taureaux. Nous sommes arrivés à la tombée de la nuit, nous lui avons apporté les premiers soins puis l’avons pris avec nous dans la voiture pour l’amener à la mission. Nous sommes malheureusement restés bloqués sur la route, enlisés dans la boue. Nous avons joint la mission par radio, et avons attendu l’arrivée du tracteur à 6h30 le lendemain pour nous dépanner. La vieille dame a pu être prise en charge à la mission, et est rentrée chez elle au bout de quelques jours, après s’être remis de ses blessures.
Nous avons aussi ce mois parcouru les différentes écoles pour évaluer l’état nutritionnel des enfants, et donner des conseils d’hygiène aux enseignants et aux cuisinières.
par ailleurs, nous avons eu des pluies, qui permettent de remplir les barrages, et de fleurir les prairies afin de nourrir le bétail, principale subsistance des familles nomades de la région.
Octobre 2018 :
Bonjour à tous,
Cet été, après une saison des pluies inhabituellement abondante pour la région, nous nous attendions à une prolifération très importante des moustiques et à une recrudescence des cas de paludisme. Cela avait été le cas après les pluies d’octobre 2017. Heureusement, cette année, le nombre de cas a été bien moins important.
Au début de l’été, l’équipe de la clinique mobile a s’est agrandie, nous avons été rejoints par Martín (un infirmier qui avait déjà participer à la clinique mobile en 2016) et Cristina (une biologiste parasitologue). Ils sont venus pour lancer le fonctionnement de laboratoire, et de notre salle d’urgence, dont la construction a été terminée. Martin nous a également remplacés, Emiliano et moi, durant le mois d’août, pendant lequel nous étions en vacances. Nous avons aussi été aidé par Benson, un jeune technicien de laboratoire kenyan, qui nous a aidé à emménager le laboratoire. Après l’emménagement du laboratoire, nous avons pratiqué une analyse de selles pour l’ensemble des enfants des écoles maternelles de Lobur, Kokuro et Napeikar. Cela a demandé beaucoup de travail, nous nous sommes rendus dans chaque école, pour parler aux parents et demander un consentement pour chaque élève, puis il a fallu collecter 2 échantillons de selles pour chaque enfant, et les analyser. Ces analyses nous ont montré une très forte prévalence de portage parasitaire chez ces enfants : 60% des enfants étaient porteur d’une giardia (responsable de giardiase), et 40% d’une Entamoeba hystolitica (responsables d’amibiase). Une relation significative a été retrouvée entre le portage d’une giardia et un état de malnutrition. Des recherches de palud ont aussi effectuées : sur 96 patients testés, 4 étaient porteurs d’un Plasmodium Ovalae. Il existe plusieurs formes de paludisme. Le parasite porte toujours le nom de Plasmodium, mais il en existe plusieurs types. Au Turkana, jusqu’à présent, pour rechercher un paludisme, on utilisait des tests de diagnostic rapide, mais ces tests ne pouvaient identifier que le Plasmodium Falciparum. La mise en évidence d’autres types de Plasmodium (Ovalae en l’ocurrence), confirme l’importance de l’installation du laboratoire, pour avoir accès à des techniques diagnostiques plus performantes.
Nous avons aussi eu la visite de 2 amies de Martin, infirmières et titulaires d’une maitrise en médecine tropicale, Natalia et Marina, que nous remercions pour leur collaboration et leur implication dans ce projet.
Les sujets abordés cet été lors des séances de prévention étaient : le VIH et les maladies sexuellement transmissibles, les soins des nouveau-nés et l’hygiène des mains. En ce qui concerne les mobiles cliniques, nous avons changé certains sites, car nous n’y avons troué quasiment aucun patient. Les populations changent régulièrement de lieu en fonction des saisons, des pluies, des pâturages. En l’absence d’épidémie majeure de paludisme, les cas que nous avons rencontrés étaient des pathologies courantes : infections des voies respiratoires, diarrhées, problèmes dermatologiques… Nous avons eu beaucoup d’accouchements, certains avec des complications. 3 bébés sont décédés du fait de pathologies congénitales. Un enfant, etabo, est né avec un syndrome poly-malformatif : il ne possède pas de membres supérieurs, et il a une fente labio-palatine. Il va bien, il grandit bien, sa famille l’a bien accepté et s’occupe bien de lui. Nous pensons qu’il pourra être opéré lors de la campagne de chirurgie au Turlana. Nous avons aussi assisté un accouchement difficile, mais qui s’est bien terminé. La mère est la femme d’un travailleur de la mission de Lobur. En fin de grossesse, elle a commencé à avoir des oedèmes aux jambes, et une tension élevée, en faveur d’une pré-éclampsie. Nous l’avons transférée à Lodwar pour qu’elle voit un gynécologue. Il a trouvé qu’elle allait bien et qu’elle pouvait accoucher à lobur, et elle est rentrée sans surveillance ni traitement. Le lendemain de son retour
Nous avons eu 8 autres accouchements, qui se sont très bien passés. Le lendemain de son retour, à minuit, elle commencé à convulser, et sa tension artérielle était très haute. Comme l’avion du Père Antonio ne peut pas voler de nuit, nous avons du l’emmener en voiture à Lodwar, accompagnée de notre infirmière Elvirah. Après une journée à essayre de provoquer l’accouchement à l’hôpital, ils ont finalement décidé de faire une césarienne. Elle et son bébé ont passé plusieurs jours en soins intensifs, et les deux vont bien actuellement.
Nous avons aussi soigné la fille du chauffeur de la clinique mobile, qui a été mordue à la main par un serpent. Malheureusement son doigt a nécrosé, et il a du être amputé. Nous avons eu à cette période 5 autres cas de morsures de serpents en 3 jours, qui ont bien évolué. Parmi les autres patients que nous avons accueillis dans notre nouvelle salle d’urgences, nous avons soigné un enfant de 3 ans somnolent et déshydraté (grâce aux tests viraux sur les matières fécales, nous avons pu déterminer qu’il s’agissait d’un rotavirus, une gastro entérite classique), qui s’est bien remis après 3 jours de réhydratation ; plusieurs fausses couches précoces ; une agression ; un accident de moto ; une plaie par balle dans la fesse, qui datait de plus de 3 semaines…
L’une des plus grandes difficultés que nous avons eu à gérer a été l’apparition de la varicelle dans la mission. Une femme de la mission était partie voir sa famille dans une autre ville, avec ses 2 enfants. Ses enfants ont contracté la varicelle, qui s’est propagée dans la mission. Nous avons essayé d’expliquer à la maman les risques en cas de contagion à des adultes et notamment des femmes enceintes qui n’ont pas eu la varicelle. Elle n’a pas écouté nos conseils, et n’a pas gardé ses enfants à la maison. Elle a présenté rapidement des signes de varicelle, et a continué à sortir et voir du monde malgré la détérioration de son état général. Sept autres enfants ont été atteints par la maladie, ainsi qu’une femme enceinte et un homme de 50 ans. Ces patients ont compris le risque de contagion et sont restés chez eux jusqu’à guérison.
Nous avons eu quelques difficultés financières cet été, mais nous continuons à faire tout ce que nous pouvons. Nous vous remercions pour votre aide, sans vous, nous ne pourrions pas continuer à apporter l’assistance dont les gens ont besoin ici.
Teresa Villa (infirmière et coordinatrice de la clinique mobile)
Fin 2018 - témoignage d'Emiliano Hernández Urrutia -
Chers amis et bienfaiteurs ;
Je vais essayer de vous résumer un peu mon histoire, quelques mots qui ne peuvent pas exprimer tout ce que j’ai vécu, mais qui pourront peut-être vous faire comprendre un peu mieux ce petit coin d’Afrique où notre aide est si nécessaire.
2009 : mon premier été au Turkana.
J'ai commencé ce projet en tant que jeune étudiant, il y a 10 ans, quand je suis allé pour la première fois au Turkana, invité par les missionnaires de la mission MCSPA.
C’est lors de cet été que j’ai découvert ma vocation d’infirmier.
Avec d'autres jeunes, "les jeunes de Lobur", nous avons commencé ce projet. Ce qui a débuté par l’achat de quelques médicaments a aujourd’hui évolué en un projet de santé qui fait référence dans cette région isolée qu’est le Turkana.
2012 : nous sommes diplômés, nous partons au Turkana !
En 2012, ma femme Teresa et moi décidons de passer un an et demi au Turkana, en tant qu’infirmiers nouvellement diplômés, afin de créer la clinique mobile. Nous avons commencé par faire le tour des villages avec une moto, mais rapidement, votre aide nous a permis d’investir dans une voiture. Depuis, le projet n’a cessé d’évoluer, aidé par le groupe des « jeunes de Lobur » et des professionnels de santé espagnols. D’autres infirmiers nous ont relayés, jusqu’à notre retour en 2018. Nous sommes venus passer une nouvelle année au Turkana, cette fois-ci accompagnés de notre fils d’un an, José.
2018 : Teresa et moi sommes de retour avec notre fils José
De retour au Turkana, nous avons retrouvé la clinique mobile, avec un projet de santé plus large, de nouveaux défis, et de nouvelles difficultés. Devant un début de structuration des soins dans la région, le gouvernement Kenyan a commencé à engager des moyens dans la région, jusque-là complètement isolée et ignorée. Certains dispensaires du territoire ont plus de moyens, et du personnel. Les « Moh », chefs médicaux pour leur comté, ont un budget attribué pour leur zone, afin de mettre en œuvre des projets de santé jusque-là inexistants. C’est un vrai changement, et une amélioration pour la région, mais la pauvreté, les difficultés d’alimentation, et l’isolement des populations restent des problématiques majeures.
Notre objectif est de s’intégrer dans les programmes gouvernementaux, afin qu’un jour la clinique mobile soit reprise par des professionnels locaux, mais pour cela il y a encore un long chemin à faire. La première étape que nous avons entamée est de créer du lien et de la coordination entre notre projet et les Moh. Nous rencontrons souvent des difficultés pour coordonner nos actions avec celles du gouvernement.
La salle d’urgence à la mission : cette année nous avons travaillé à la mise en place d’une salle d’urgence à Lobur. Depuis l’ouverture de cette salle, nous avons reçu de nombreuses urgences, dont certaines assez graves. Nous avons aussi effectué beaucoup de suivi de grossesse, des échographies, et des accouchements.
Le cas le plus marquant de cette année a été celui d’Asibatar, un bébé qui souffrait d’un cancer, et qui a pu recevoir les soins nécessaires grâce à l’accompagnement de la clinique mobile, et l’assistance de nos bienfaiteurs.
Un laboratoire dans la salle d’urgence: grâce au soutien de l’université d’Acala de Sorgue, nous avons reçu Cristina, spécialiste en microbiologie et parasitologie qui, avec Martin, infirmier de notre clinique mobile, ont monté ce laboratoire. Le travail de coopération avec l’université continue, nous avons déjà pu détecter la présence dans la région d’une souche de paludisme qu’on ignorait dans la région.
Nous sommes arrivés à la fin de notre séjour au Turkana, et nous avons passé le témoin à Paula, pour quelques mois, qui est déjà intervenue dans la clinique mobile par le passé, en tant qu’infirmière. Elle continuera à envoyer des nouvelles, et vous présentera Iona, un médecin de Tenerife qui vient travailler un an avec la clinique mobile, et dans la salle d’urgence.
Nous continuerons à suivre et soutenir ce précieux projet, qui a grandi avec nous. Ce projet amène de l’espoir à des milliers de personnes, des mères d’enfant comme Asibatar qui a pu survivre à sa maladie, un soulagement pour ceux qui souffrent.
Teresa, José et moi prenons un autre chemin, et rentrons en Espagne, le Turkana dans nos cœurs. Nous sommes profondément reconnaissants aux missionnaires, qui sont devenus des amis au-delà de nos relations professionnelles, qui nous ont tant appris, et continuent d’accompagner nos collègues. Merci aux « jeunes de Lobur », et à nos bienfaiteurs pour tout ce qui vous faites.
Emiliano Hernández Urrutia
Ejokonoï est une association à but non lucratif, régie par la loi du 1er juillet 1901. Parution au JO du 15 juin 2013.
Association Ejokonoï